
«Toutes les histoires doivent avoir un méchant.»
– David Pressfield.
Même la nôtre…
Les méchants des récits sont les méchants de nos vies
Quand on imagine des méchants, on pense à Scar dans Le Roi Lion. À Magnéto dans X-Men. À la Marquise de Merteuil dans Les Liaisons dangereuses. Ou encore à Big Brother dans 1984. En somme, une liste de méchants typiques.
Mais le méchant n’est pas toujours une personne, ni même un être animé. En théorie des récits, on parle d’ailleurs plus volontiers d’«antagoniste». Un antagoniste peut être une situation, un problème, un obstacle, physique ou abstrait. Et bien souvent, si l’on creuse un peu sous la surface, sous la force externe qui semble bloquer le protagoniste dans sa quête (qui prend justement l’apparence d’un méchant, d’une situation, d’un obstacle quelconque) on se rend compte que ce qui empêche le protagoniste d’atteindre son but, en réalité, est une force interne.
Même Scar, dans Le Roi Lion, n’est pas le vrai méchant. Ce que Simba doit avant tout surmonter, c’est sa culpabilité. C’est seulement une fois cette barrière interne brisée qu’il osera retourner vers les siens pour défier Scar, venger son père et restaurer sa place légitime sur le trône.
Dans la grande majorité des récits, les méchants ou les obstacles permettent de mettre au jour les luttes internes, les peurs, les blocages mentaux ou les traumatismes du protagoniste.
Et ces luttes incarnent celles qui habitent nos existences individuelles. Nous sommes toutes et tous confrontés à des obstacles, possédés par des croyances limitantes – peur du jugement ou de l’échec, résistance, perfectionnisme, manque de confiance, état d’esprit de pénurie, enfance chaotique, expériences d’abus, d’isolement, d’agression … –, qui nous empêchent d’être l’héroïne ou le héros de notre propre vie, d’atteindre les rêves qu’on se peint dans notre esprit, d’agir en accord avec nos valeurs et désirs les plus profonds.
Du rôle essentiel que jouent les méchants
Si les antagonistes sont si importants, c’est justement parce qu’ils poussent les protagonistes à l’action. Dans toute bonne histoire, le héros finit par affronter le méchant, peu importe sa forme. Et c’est de cette confrontation que naît l’histoire. Car c’est en affrontant le méchant, en attaquant la situation de face, en faisant face à ses peurs et à ses traumatismes que le protagoniste peut se transformer.
Le rôle du méchant est justement de déclencher cette transformation en posant un défi au protagoniste, que celui-ci va devoir relever pour évoluer et révéler une nouvelle part de lui-même. Entre le début et la fin de l’histoire, non seulement la situation externe du protagoniste a changé, mais le protagoniste lui-même n’est plus non plus le même. Qu’il gagne ou perde la lutte, il en ressort inévitablement changé.
C’est en acceptant cette lutte que le protagoniste devient héros. S’il choisit la fuite, pas de héros, pas d’histoire.
C’est cette évolution du protagoniste en héros qui donne naissance à une bonne histoire, à un récit digne d’être conté.
Affronter les méchants de notre vie
Les histoires nous rappellent que le seul moyen d’accéder à cette autre part de nous-mêmes, ensevelie dans les recoins de notre être, de s’élever au-dessus de nos circonstances présentes, de révéler qui nous sommes vraiment et de devenir le héros de notre propre vie, c’est d’affronter les obstacles qui se dressent sur notre chemin, de nous confronter à nos peurs, à nos croyances limitantes, à nos traumatismes.
Est-ce que tu veux seulement rester le protagoniste de ta vie, ou en devenir le héros? Est-ce que tu veux faire de ta vie une histoire digne d’être contée?
Alors tu n’as pas d’autre choix que d’affronter les antagonistes de ton histoire, qui t’empêchent de réveiller le héros qui sommeille en toi.
Souviens-toi que, même si tes antagonistes semblent se manifester sous des formes externes – tes circonstances, ta situation, un problème, un obstacle, les lois, les attentes de la société, le système –, ils sont en réalité nés dans ton esprit. Détermine les vrais antagonistes qui contrôlent ta vie: quels peurs, croyances limitantes, traumatismes te retiennent d’agir et de faire évoluer ton histoire?
Puis pourchasse-les sans relâche.
De l’autre côté de cette lutte se trouve une nouvelle version de toi-même.
«Nous sommes tous confrontés à un méchant dans notre vie. Qu’il s’agisse de la résistance qui nous empêche d’écrire notre roman, ou de composer notre symphonie, peu importe sa nature, nous devons tous y faire face. Le méchant ultime, c’est la mort. Le méchant donne vie à toute l’histoire. Sans grand méchant, il n’y a pas de véritable histoire. Et plus le méchant est vil, plus le héros est poussé à l’affronter.»
– Steven Pressfield / How I Write Podcast (Steven Pressfield — Every Story Needs a Villain)